Tout à coup, l’illusion s’arrête. Je croyais que j’avais la maîtrise de ma vie. Ou alors j’avais oublié que c’était une illusion. Je (me) suis perdu. J’ai froid.
Je me souviens de nombre de ces passages étroits où la gorge se serre et où grandit l’angoisse bien sensiblement dans mon ventre. Les occasions sont diverses mais, de la perte d’un portemonnaie ou d’un téléphone portable à l’anxiété à la suite de la maladie d’un très proche ou d’une perte de repères liée à un changement professionnel ou à un deuil au sens large du terme (déménagement douloureux p. ex.), à chaque fois il me semble que j’entre dans un même type de scénario.
Je constate que, souvent, ce qui est vecteur du resserrement, c’est la perte de maîtrise ou, devrais-je dire, la perte de l’illusion de maîtriser un pan ou un autre de ma vie. De ces étroits goulets qui sentent plutôt la désolation et la mort, chacun à sa manière en a vécu. Ils semblent inhérents à l’existence. Mais serait-ce des éveils ? Plutôt rares sont ceux qui en témoignent tout à fait librement, tellement ces passages marquent jusqu’à la chair de ceux qui les ont traversés. Le simple fait d’en parler fait parfois remonter la peur de ressusciter l’expérience et la douleur qui l’accompagne.
N’allons pas dire trop tôt que ces épreuves nous font « grandir » – même si souvent c’est vrai ! D’une part parce que nous ne sommes pas égaux et nous n’encaissons pas les chocs de la même manière… D’autre part, parce que, personnellement, je ne suis parvenu à le dire pour moi-même que plus tard en relisant. Et encore,… en le murmurant !
A chaque fois, peu ou prou il est question de mourir. D’ailleurs, il m’est arrivé d’entendre dire : « Tu ne vas pas en mourir ! » Encore une vérité difficile à encaisser sur le moment où j’ai le sentiment puissant que je ne m’en sortirais pas indemne. A chaque fois, ce fort sentiment suscite en moi un cri : le cri du tout-petit abandonné. « Des profondeurs, je crie vers toi, Seigneur ! » et je cherche ta présence comme le seul bien qui restaurera mon coeur torturé.
Mais, comme son nom l’indique, le passage… est passager ! L’étau, à un moment un peu mystérieux, se déserre et laisse à nouveau se déployer la paix. Comme lorsqu’on sort d’un lieu confiné où où l’air s’est fait rare et que l’on arrive enfin au grand air ! Quel sensation de libération, d’apaisement, de RÉSURRECTION !
Je peux bien sûr relire les situations que j’ai traversées dans une perspective de troubles psychologiques liés à une histoire un peu chaotique. Mais, indéniablement, pour mon cas, la présence d’éléments spirituels a été déterminante. J’ai toujours considéré que Dieu employait le potentiel de la situation pour en tirer un bien.
Je m’appelle Pascal, l’enfant du passage, et je suis déjà un peu ressuscité, même si je n’ai pas encore complètement passé la mort… De toutes celles et ceux qui vivent ces passages, je me sens proche. Après la nuit, il n’y a pas la nuit…
_____________________________
Image : © DR
Légende : La matin de la résurrection, tableau du peintre américain James Martin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire