Mes activités politiques au sein du comité du PDC de Vollèges et plus largement dans le champ politique au sens large dans le Bas-Valais sont antérieures à mon engagement comme laïc permanent dans l'équipe pastorale du secteur de Bagnes (diocèse de Sion). Extrêmement conscient de l'importance d'un engagement fidèle et profond des chrétiens dans le champ politique, la question se pose, dans mon cas, quelque peu différemment à cause de mon mandat public et officiel au service de l'Eglise. Qu'en est-il ?
Tous seront d’accords pour dire que cette position est risquée. Je l’accorde volontiers. Pour autant, le fait de devoir risquer n’est-il pas un argument insuffisant pour qu’il faille abandonner ? Il y a plusieurs types de situation. Pour un laïc permanent, travailler dans un parti se réclamant des valeurs du christianisme – et par ailleurs encore largement majoritaire à Vollèges – semble aller de soi et ne pas poser de bien gros problèmes. En effet, en période de calme, ma fonction de secrétaire se coule dans une indifférence à peu près générale.
A l’heure actuelle, le PDC vit des heures un peu plus houleuses, puisque des mécontentements se sont faits jour au sujet de la manière dont sont conduites les affaires communales et que des tensions émergent de droite et de gauche. Il faut dire que les élections communales s’approchent et que ce sont incontestablement des lieux (c’est à dire les élections internes ou les élections officielles) où le peuple aime montrer son pouvoir souverain soit en nommant, soit en évinçant les personnes qu’elles souhaitent ou non voir devenir devenir ses représentants. Les électeurs ont par ailleurs le devoir fondamental de l’exercer. Bref.
Ma position au sein de ce comité n’est tenable – me semble-t-il – qu’aux 6 conditions suivantes :
1. que le comité montre un front uni et solidaire et que ses dires soient en cohérence avec ses actes ;
2. qu’il assure un processus de pilotage totalement transparent et ouvert de la campagne électorale et des élections en s’assurant entre autres, constamment d’un maximum de distance critique face aux événements et aux propos tenus ;
3. qu’il respecte sa position d’exécutif, c'est-à-dire qu’il reste soumis aux décisions souveraines de l’Assemblée générale ;
4. qu’il ne prenne parti pour aucun camp émergeant lorsqu’il y a des dissensions, mais plutôt qu’il cherche à occuper une position arbitrale ;
5. que les seuls objectifs du comité soient la pacification des relations, la construction d’une société locale générant la solidarité, la confiance mutuelle, la bienveillance et la participation à la mise en place d’une équipe communale compétente et partageant les objectifs du comité ;
6. qu’il s’assure que toute atteinte au respect et à l’intégrité personnelle d’autrui soit bannie de ses Assemblées générales et de toutes ses instances.
Pour ma part, j’estime que ces 6 conditions sont réunies et que ma position de laïc permanent engagé dans ce champ – actuellement conflictuel – peut même être vécu comme un travail pastoral puisque mû par un profond désir d’œuvrer pour paix et la construction d’une société communale responsable et ouverte. En outre, il me semble extrêmement important de savoir distinguer fondamentalement la personne de sa fonction. Cela permet, indépendamment du travail effectué, des décisions prises et des actes posés par cette personne, de continuer à l’aimer pour ce qu’elle est. Je puis ainsi émettre certains reproches sur les actions et les comportements des personnes sans que, ni la hargne, ni l’amertume ne montent en moi et ne diminuent ma clairvoyance.
Il existe pourtant un autre type de risque. S’il est possible à mes collègues du comité, à mes supérieurs sur le plan ecclésial, à mes proches, parce qu’ils me connaissent bien, d’apprécier correctement ma position et mon comportement dans cette situation et d’affirmer que je suis dans la vérité et la justesse, il n’en est pas de même pour mes éventuels détracteurs qui pourraient, eux, voir les choses d’une autreperspective. Si tant est que je devais essuyer des attaques ou des jugements à mon encontre de la part de l’un ou l’autre groupe de la population, c’est ma position pastorale ou ecclésiale, et plus précisément ma parole en tant que membre laïc du clergé, qui pourrait être publiquement discréditée. Et de cela, indépendamment de la justesse de mon comportement, je ne suis pas maître.
Est-ce une raison d’abandonner cette charge à la charnière de l’Eglise et de l’Etat ? L’une et l’autre seront-elles toujours en concurrence ? A l’aube de mon engagement à plein temps et de plein droit dans l’équipe pastorale, dois-je déjà choisir mon camp ? Ne puis-je pas participer aussi à la construction du "vivre-ensemble" des hommes de cette terre dès maintenant autrement que par un apport spirituel ? Que ton visage m’éclaire, Seigneur, et je connaîtrais le chemin !
Pascal Tornay